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UNE SECHERESSE HIVERNALE OU QUID DE LA RECUPERATION DE L’EAU A L’ECHELLE FRANÇAISE



 

Si je vous dis sécheresse, à quoi pensez-vous ? Certainement pas à l’hiver, et pourtant.

Un début d’année beaucoup trop chaud, beaucoup trop sec. Ce constat n’est pas seulement français, mais mondial. L’Inde qui enregistre son mois de février le plus chaud depuis 1901, le Luxembourg qui connaît un mois de février record en ce qui concerne son manque de pluie, la France qui au travers de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, annonce que le pays doit se préparer à une forte hausse des températures moyennes et qui, au travers de Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire annonçait fin février une sous-capacité des nappes phréatiques à la suite de plus de 30 jours sans pluie dans certaines régions : voici un constat, celui d’un échec, non pas seulement national mais mondial. Les Accords de Paris voulaient contenir le réchauffement climatique entre 1.5 et 2 degrés. Christophe Béchu annonce une hausse moyenne de 4 degrés. Constat alarmant. Destructeur. Frappant. Ne pas l’évoquer serait blessant, ne pas l’analyser serait irresponsable.

 

Nous aurions pu faire un énième article générique sur le climat, nous aurions également pu tirer à boulet rouge sur des responsables supposés ou nous aurions pu nous réfugier derrière un discours, derrière une fatalité et une impossibilité de changer les choses. Oui, nous aurions pu faire cela, mais à quoi bon ?


L’eau

 

Chez TOROW, nous pensons aux problématiques actuelles et futures tout en analysant les enjeux de la transition environnementale et du défi climatique auquel nous faisons face. Un des défis majeurs de ce début d’année n’est pas forcément celui qui vient immédiatement à l’esprit, et pourtant une crise se profile : celle de l’eau. Cette ressource si commune pour certains, si rare pour d’autres. L’eau.

Ces derniers mois, le manque de pluie est devenu un sujet d’actualité : nappes phréatiques au plus bas, terres agricoles sèches, menace d’écosystèmes.

Le constat est là. Devant nos yeux. Que faire, et surtout que peut-on faire à l’échelle française ?


1%.


Voilà le pourcentage des eaux usées recyclées en France. À titre comparatif, l’Italie est à presque 10% quand l’Espagne avoisine les 15% et sans mentionner Singapour qui excelle avec près de 40%/ et des nations faisant même bien mieux. En 2022, le gouvernement français annonçait son intention de permettre de nouveaux usages des eaux usées traitées[1]. Emmanuel Macron avançait même, le 30 mars 2023, un objectif d’une réutilisation des eaux usées à hauteur de 10% d’ici à 2030. Domestiquement, on différencie les eaux vannes (toilettes) et les eaux grises (douche, lave-linge, etc.) qui elles sont le sujet des débats de ce début d’années et qui représentent près de 40% de notre consommation d’eau potable. Peu polluées, les eaux grises sont au cœur de problématiques publiques : l’irrigation, l’arrosage des espaces verts ou bien même le nettoyage d’espaces publics. L’idée est bonne, l’exécution plus complexe. En effet, la récupération des eaux grises nécessite des travaux – quelquefois coûteux – parfois fastidieux à mettre en place.

Que peut-on faire à l’échelle nationale mais aussi localement ?


Les méga-bassines


À l’échelle nationale, Marc Fesneau s’est dit favorable à la multiplication de « méga-bassines » afin de pouvoir stocker et redistribuer l’eau pour certains secteurs quand le besoin se fait sentir. Sur le papier, le concept semble ingénieux, utile. Néanmoins, ces méga-bassines pourraient poser problème comme l’affirme Greenpeace[2]. L’association écologique explique que ces méga-bassines sont problématiques d’un point de vue environnemental : une pression accentuée sur les nappes phréatiques qui sont déjà en situation de stress hydrique (ces méga-bassines ne contiennent pas que de l’eau de pluie), une évaporation de l’eau qui stagne et donc une perte de cette ressource, et enfin l’utilisation de l’eau de ces méga-bassines principalement destinées à l’élevage industriel pouvant nuire aux producteurs locaux. Un  terrain d’entente semble difficile à trouver sur un plan national. Au-delà même des joutes verbales entre gouvernement et associations, le sujet des méga-bassines a évolué à un échelon bien plus sérieux avec des violences entre policiers et manifestants fin mars à Sainte-Soline (Nouvelle-Aquitaine). Le sujet ici n'est pas de prendre position, mais de dire que la crise climatique, particulièrement concernant le stockage et l’utilisation de l’eau, à laquelle le monde fait face n’entraîne pas qu’exclusivement des débats, mais devient bien plus physique. Cependant, l’idée de stocker l’eau fait sens, même si c’est bien la méthode qui pose question. Une solution ne pourrait-elle pas être la mise en place de retenues collinaires ? Bien moins controversées d’un point de vue environnemental, ces dernières sont remplies par les eaux de surface et les eaux de ruissellement, et non par les nappes phréatiques. Bien qu’urgente, bien qu’imposant un consensus, la résolution de cette crise semble loin d’aboutir. Néanmoins, d’autres projets locaux voient le jour et il convient de souligner ces initiatives.


Des infrastructures à redéfinir


TOROW, c’est l’innovation et il semble donc essentiel de mentionner un autre projet – lui à plus petite échelle – qui est en développement. L’Université Toulouse III – Paul Sabatier a mis en place, comme l’explique un reportage effectué par le service public[3], un filtre constitué de matières organiques avec l’introduction de vers de terre afin d’amener l’eau usée récupérer aux racines des plantes efficacement. Cette installation est limitée au campus à l’heure actuelle, mais un changement de réglementation et un financement pourraient donner lieu à des projets similaires et devenir une solution viable face à la sécheresse affectant le milieu agricole.

Néanmoins, cela est encore un défi qui – comme mentionné au préalable – concerne les infrastructures qui doivent être l’objet d’un aménagement structurel afin d’adapter la récupération d’eaux usées.


Qu’elle soit récupérée directement du ciel ou bien recyclée, l’eau est là, disponible et en abondance. La question n’est pas dans sa présence, mais dans sa récupération, son stockage et son recyclage. Tout est question d’aménagement du territoire, d’infrastructures et de réglementation. Le champ du possible est sous nos pieds, au gouvernement de ne pas être à sec d’idées.


 

                                                                                                          Quentin Bouvier, Ph.D.

Analyst Leader, TOROW





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